Escarres, Philippe témoigne
mercredi 7 janvier 2009

Philippe, que pourriez-vous dire à un jeune para ou tétraplégique ?

- Que préconisez-vous pour éviter les escarres ? Avez-vous des astuces ? : Ce qu’il faut faire et ne pas oublier…observation de la peau, humidité, chaleur ….
Les infections…
Les escarres d’appui
Les escarres de frottements.

Je souhaite répondre concernant les seules escarres d’appui :
Je suis en fauteuil depuis 10 ans et je n’ai jamais eu d’escarres, sans doute parce que, sur les conseils de mes kinés, je m’oblige à un certain nombre de « bonnes pratiques » :

  • bien sûr, d’abord et avant tout bien surveiller les zones d’appui, assise principalement ; seul avec une glace - je le fais au moins une fois par semaine, même si j’ai suffisamment de sensibilité pour qu’une petite douleur m’alerte - ou avec l’aide d’un proche, du kiné, de l’aide à domicile etc.… Ne jamais hésiter à en parler et à montrer ; l’escarre est une véritable « cochonnerie ». Ne pas craindre de « se faire peur » – principe de précaution ! Pas besoin pour autant de recourir à un professionnel : un proche s’alarmera à la limite plus vite et si lui et vous vous avez un doute il sera toujours temps de consulter son kiné, son infirmier ou son médecin ;
  • respecter une hygiène sans faille et dans la mesure du possible maintenir un bon état général : pas trop de fatigue, de stress (facile à dire…) ; l’escarre aime les états de faiblesse…

Astuces ou bonnes pratiques ?

  • soulager régulièrement son assise en se soulevant de son fauteuil (au départ, je le faisais toutes les demi-heures, ce qui est sans doute excessif) ou en se mettant sur le coté ou sur le ventre sur son lit ; c’est presque toujours possible quelque soit l’endroit où l’on se trouve ;
  • ne jamais rester dans de l’humidité, surtout chaude ; bien s’éponger après le bain ou la douche et bien essuyer le coussin…
  • ne jamais rester longtemps sur une surface dure – type banc public – sans coussin ; j’utilise mon coussin même en voiture sur les parcours un peu longs ; et attention aux transferts un peu brutaux ;
  • acheter, donc, un bon coussin, généralement bien remboursé, le garder propre bien sûr et ne pas hésiter à l’utiliser en toutes circonstances ; pas de coussin de salon !!
  • au moindre doute, rougeur, irritation, « bouton », masser pour faire circuler le sang avec une crème grasse ; il faut toujours en avoir en réserve ; en demander au médecin ; cela peut aller de la biafine à des « huiles » plus coûteuses (et mal remboursées…) mais efficaces ; mais j’utilise même de la crème type Nivea en cas de besoin ; ce qui compte c’est de bien masser.

Le faire soi-même ? Sinon, par qui ? Les soins sont pratiqués dans la mesure du possible par vous-même, un soignant, une personne de votre entourage ? Ce que vous préconisez, ce qu’il faut éviter ? :

  • cf. & précédent ; encore une fois en matière de prévention, plus que de soins je parlerai de comportements, de réflexes, de bonnes pratiques à faire soi même, avec un proche, une aide à domicile ou un « professionnel » même si la surveillance et les pratiques ne supposent pas une grande technicité ! Là encore je me répète : s’il y a le moindre doute en parler, montrer ; dans une très grande majorité de cas, la prévention suffit à éviter l’escarre et il faut à tout prix éviter qu’elle ne s’installe.

En revanche traiter une escarre est l’affaire du médecin.

Comment gérer la période d’immobilisation Pendant la période de reconstitution de votre peau qui peut prendre un laps de temps important : avez-vous mis en place des astuces, bricolé une aide technique (tournepage…) pour ne pas vous retrouver coupé de vos activités et de l’extérieur ? (téléphone, ordinateur, lecture, radio, TV et autres activités etc.…) :

  • J’ai eu la chance de ne jamais avoir connu d’escarre véritable ; tout au plus quelque frayeur lorsque une rougeur, une coupure, un renflement de la peau mettait plusieurs jours à disparaître. Durant ces périodes, je n’ai fait que redoubler de prudence et respecter encore plus les bonnes pratiques. Toutes les astuces sont alors bonnes pour soulager au maximum la zone irritée. Comme je l’ai dit précédemment, le soin de l’escarre est une autre affaire qui nécessite le recours à un médecin et à ses conseils.

Pistes pour aider à gérer le problème sur le plan psychologique ? Est-ce que dans le cadre des actions préventives (en particulier la surveillance de la peau, les soins…), vous avez le sentiment d’avoir développé de nouvelles relations avec votre corps par rapport à avant l’accident ? Si oui, comment les décririez-vous ? :

  • Pas spécialement ; tout au plus une plus grande attention à un corps plus fragile ; mais quand on est para ou tétra la liste des points à surveiller est longue ; il faut essayer de l’accepter et s’astreindre à ce « contrôle technique ». Votre corps même meurtri vaut tout même plus que votre voiture…

D’après vous, qu’est ce qui vous a permis sur le plan psychologique, de mettre en place ces actions préventives ? Il semble que les nouveaux blessés éprouvent de grandes difficultés à les mettre en œuvre :

  • Là on sort du strict problème de l’escarre… Il faut apprendre à accepter son corps tel qu’il est devenu, plus fragile, et toutes les « petites misères » que cela comporte ; la prévention des escarres, comme celle des infections urinaires ou bien d’autres bobos, fait partie des contraintes nouvelles qu’un valide n’a pas à affronter. Personnellement j’ai eu la chance de retrouver une amie psychologue qui m’a aidé à accepter et à retrouver le goût de la vie, parce que comme nous le disons à l’APF nous sommes tous faits pour aimer la vie ! Ne pas hésiter à se faire aider dans ce domaine, même et surtout sur une courte période.

Je vous joins un site internet parmi d’autres : site escarre.fr, lien externe.

Merci Philippe

- retrouvez ce document en format PDF, lien interne - (38Ko) - Date : février 2007